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                            Remuer les cendres : 

 

 

Le projet que je vous présente s'intitule Remuer les cendres et il propose une réflexion sur les corps non réclamés des personnes décédées à Montréal. Mon projet de recherche-création se déploie à travers plusieurs médiums (audio, photographie, vidéo et textualité). Pour atteindre mes objectifs, j’ai l’intention de créer des récits funéraires en textes et en images pour des défunts inconnus, afin que ces personnes ne soient pas oubliées. D’une part, je me suis procuré une liste de nom des corps non réclamés sur le site web du cimetière le repos Saint-François d’Assisse de Montréal, et une autre liste à partir du site web du gouvernement du Québec depuis 2005. Ces documents, je les ai étudiés un peu à la manière d'une investigation. Ils sont révélateurs de plusieurs tabous de la société, comme la solitude (personne vivant seule), la surdose de médicaments et de drogues illicites, le suicide, la maladie mentale et bien sûr la mort. Ils vont également me servir de matière première textuelle, et deviendront donc des éléments incontournables pour faire émerger des récits et contribuer à créer un lien de proximité avec ces morts, car il s'agit bien ici de les connaître un peu plus.

 

D’autre part, pour m'aider à développer mes récits, je me suis déplacé sur les lieux de leurs dernières habitations pour cartographier leurs milieux de vie et m'immerger dans leurs environnements. La photographie et la vidéo me permettront d'archiver ces infiltrations. Ce travail prendra donc la forme d'une enquête artistique, puisque je travaillerai aussi ces archives, les rapports des coroners, et la liste des corps non réclamés qu'on peut aisément trouver sur le web. Derrière ce projet, l’idée serait de rendre la dignité à tous ces défunts en conjurant leur absence par le récit et par l’image ; il s'agit d’évoquer leur aura, de leur accorder une nouvelle présence au monde. Je désire dialoguer avec les morts de ces inconnus par des récits équivoques mi-réels, mi-fictifs, et faire émerger de nouveaux rituels pour essayer de rendre de la dignité à ceux qui sont morts sans qu’aucune famille ne soit venue les célébrer. À travers la mort de ces grands oubliés, je vais réactualiser leurs morts dans une perspective d’une célébration de ces défunts lors d’une réception qui sera organisée sur invitation pour célébrer le départ de ces corps non réclamés.

 

Pour finaliser ce projet, une vidéo sera projetée, et elle provient des échantillons sonores urbains tout en insérant des images fixes (des visages flous) en incrustations. De plus, une trame sonore viendra accompagner la vidéo dans laquelle on pourra entendre la liste des 1500 noms de tous les corps non réclamés depuis 2005. À travers cette installation, je désire valoriser l’unicité de chaque être humain, et la singularité de leur présence; c’est pourquoi il m’importe que chaque personne soit clairement nommée et identifiée dans l’enregistrement. Un débit de lecture assez lent permet de bien isoler chacun des noms. En faisant cela, c’est un peu une façon de les célébrer, de leur rendre hommage un à un, et de continuer à évoquer un lien de proximité entre les morts et le public. Pour entendre cette trame sonore, les gens doivent traverser un couloir (de 10 X 8 X 3 pieds) rattaché à l’entrée de la salle d’exposition.

Depuis plusieurs années, afin de reconstituer des instants de vie qui témoignent de la genèse des individus et de leur devenir, j’approfondis les événements imprévisibles de leur passé. Ma démarche artistique aborde les tabous sociaux, avec une prédominance pour les thèmes de la mort, de la solitude vécue à travers la maladie ou des traumatismes. À cela s'ajoute les questions identitaires, puisque depuis le tout début de mes études au baccalauréat en arts visuels et médiatiques, je me suis penché sur des histoires individuelles et collectives.

 

Ma démarche explore la notion de marqueurs d’identité et de repères existentiels. Je cherche à explorer comment le temps fait son œuvre en laissant des traces et des repères à même l’existence. Ces traces proviennent de situations personnelles, de moments vécus ou d’épreuves biographiques ou autobiographiques, tout comme de documents d’archives ou de lieux. Ces éléments marquent le temps, l’espace et le corps. Ils deviennent les signes insondables d’un processus existentiel et traduisent le caractère mouvant, fragile et vulnérable des identités. Cette quête artistique se rattache ainsi plus particulièrement à la question des traces mémorielles et identitaires qui agissent comme véhicule de réminiscences mentales et comme possible théâtre de constructions de soi.

 

À travers mes œuvres, il est souvent question du temps qui passe et façonne l’identité, de la mort et de la souffrance physique et psychologique, de la quête de repères, de la mémoire des lieux, des gens et des choses. À partir de mes expériences autobiographiques, je raconte ma propre histoire à travers celles des autres, et je cherche à transcrire le silence en donnant la parole aux oubliés

 

 

Issu d’une communication donnée en décembre 1977 à Chicago lors de la table ronde « Lesbiennes et recherche littéraire » de la conférence de l’Association des lettres modernes. Un texte écrit par Audre Lorde, écrivaine et poétesse américaine, militante féministe, lesbienne engagée dans le mouvement des droits civiques en faveur des Afro-Américains.


En effet, dans son texte Transformer le silence en paroles et en actes (1977) elle souligne : « J’ai constaté à maintes reprises que ce que je considère très important doit être exprimé et partagé, même au risque que mes paroles soient meurtries ou mal interprétées »

Une trame sonore viendra accompagner la vidéo dans laquelle on pourra entendre la liste des 1500 noms de tous les corps non réclamés depuis 2005. À travers cette installation, je désire valoriser l’unicité de chaque être humain, et la singularité de leur présence; c’est pourquoi il m’importe que chaque personne soit clairement nommée et identifiée dans l’enregistrement. Un débit de lecture assez lent permet de bien isoler chacun des noms. En faisant cela, c’est un peu une façon de les célébrer, de leur rendre hommage un à un, et de continuer à évoquer un lien de proximité entre les morts et le public.

Une vidéo sera projetée, et elle provient des échantillons sonores urbains tout en insérant des images fixes (des visages flous) en incrustations. L’image en mouvement (la vidéo) deviendra le dispositif principal pour mon projet d’exposition de fin de maîtrise.

RÉFÉRENCES ARTISTIQUES :


Influencé par le travail de Boltanski, et de Sophie Calle. D’une part, j’aborde les mêmes thèmes que Boltanski, c’est-à-dire tout le travail sur la mémoire, l’oubli, la mort et il travaille à partir d’archive pour évoquer le récit.


Dans l’œuvre, Les Registres du Grand-Hornu (1997), Boltanski mentionnait: « Il n’est pas juste de dire 5.000 mineurs. Il faut nommer chacun d’eux. Ce ne sont pas des groupes anonymes, mais des individus ».


D’autre part, les œuvres de l’artiste Sophie Calle traversent souvent les grands thèmes de la perte, de l’invisible et de la disparition, et se déploient en une multitude de microrédits dans lesquels texte et image cherchent à donner une matérialité à l’absence. Je vais m’appuyer sur son travail Je vais élaborer des stratégies qui font cohabiter ensemble les notions de fiction, de trace identitaire et d’intimité sous forme d’une enquête – d’investigation à partir de mes documents incontournables, les rapports des coroners.